Les toiles de Simon Leroux ressemblent à des rébus. Elles n’en sont rien. Le mystérieux agencement de signes visuels appliqués à la peinture à l’huile sur des fonds de couleur acrylique et éclatante ne cache nulle anecdote, nul conte, nul message secret. Ensemble ils composent pourtant bel et bien une énigme ; c’est toutefois dans les images et non plus dans les mots qu’il faudra en trouver le dénouement.
Tête de caniche ou carte postale, broche de kebab ou cornet de glace, essieu de voiture ou doudou-peluche, les motifs récupérés par l’artiste n’ont a priori rien d’extraordinaire. Non contents d’avoir remporté la palme de l’anodin, ceux-ci abondent pourtant dans les registres usuels – des réseaux sociaux aux publicités – dans lesquels circulent sans s’arrêter les images qui nous entourent. Elles remplissent les banques d’illustrations compilées par Simon Leroux et les œuvres qu’il confectionne à partir de ce répertoire. Sur leur surface, les signes se reproduisent en variations, essayent toutes les combinaisons de formes et de textures que le peintre saura imaginer, jusqu’à perdre tout sens ou profondeur rêvés. L’artiste les juxtapose, pêle-mêle et toujours sur le même plan, dans une démarche qui emprunte autant au pop art qu’au collage, mais aussi à l’univers baroque – peinture et musique comprises.
Par ses tours de pinceau-passe-passe, le plasticien-prestidigitateur s’essaie à la virevolte et à la pirouette, pour faire apparaître l’harmonie dans le chaos. Ses compositions s’en teintent aux sens propre et figuré, qui cherchent à escamoter tout sens traditionnellement exprimé par le langage, par des formes et des volutes virtuoses, des enchevêtrements inscrits dans des rectangles d’or et autres techniques picturales plus ou moins passées. En vérité, la magie non plus n’est pas miraculeuse, qui repose uniquement sur le contrôle – et le détournement – du regard pour faire passer le truc. Du chapeau du magicien ne sortira rien d’autre que ce qu’on voit déjà : des formes et des couleurs, en un certain ordre assemblées pour montrer qu’elles ne sauront jamais s’épuiser.
Texte écrit par Horya Makhlouf à l’invitation de Documents d’Artistes Bretagne pour BASE, 2022.