Schiste noir et Granit Rose
Schiste noir et granit rose Ma recherche plastique auprès de la Manufacture des tabacs de Morlaix s'est en premier lieu traduite par une étude des matériaux de sa fabrication. La dame de granit, son surnom depuis des siècles, à une forte signification d'abord par ce rapport fondamentale de la matière, sa robe est en granit rose de l'île calot, son interieur, ses murs sont un mélange de schiste, de quartz, de béton, et d'acier. Après mainte questions et pistes voulant se traduire par de la sculpture sur ces élements, il m'est apparut qu'un lieu, plus que son ossature, son architecture, a sa propre existence par ce qu'il véhicule. comment parler de la Manufacture sans produire une énième sculpture copiant ses traits ? Par le surnom «La dame de granit», on personnifie la manufacture, comme pour lui donner une présence, quelque chose de fantomatique se diffuse au travers. Je me suis longuement penché sur ses 250 ans d'histoire. Un instant est pourtant resté gravé en mémoire plus fort que les autres. L'incendie du 23 octobre 1995. J'ai donc fait le choix de réactiver les mémoires, pas tant par la recherche constante dans les archives de la ville, mais plus par l'humain, car ce qui définie la Dame de granit c'est son humanité. Je l'ai réellement compris suite à mes pérégrinations dans son antre et aux rencontres fortuites avec quelques personnes voulant bien me raconter leur passif avec la Manu. Extraordinaire trésors de souvenirs, qui soutiennent les fondations de son histoire. d'autant plus concernant cet incendie, avec à la fois un traumatisme encore retentissant après des années et ce qui en a découlé: Une solidarité, une vrai forme egregorique a vu le jour dès les dernières cendres tombées. tous se sont soudés pour faire exister encore un peu plus ce lieu: «perdre la Manu à l'époque, c'était perdre un peu l'histoire de Morlaix» extrait de l'entretien de Jan Christophe, Pompier durant l'incendie de 1995. «La Manu, grâce à la solidarité, à l'engagement de ses salariés à permis de faire face à cet évènement important et de le dépasser.» Extrait de l'entretien de Gérard Bertrand, Directeur de la Manufacture en 1995. j'ai donc questionné, rassemblé, archivé, par des entretiens, axant le sujet sur cet évènement j'ai eu la possibilité de recueillir la parole d'un des pompier qui a bravé l'incendie, d'un ouvrier qui a toujours connu ce lieu comme plus qu'un revenu mensuel et son ancien directeur, qui a su par pragmatisme détourner un cauchemar en un évènement solidaire. «Devant une flamme, dès qu'on rêve, ce que l'on perçoit n'est rien au regard de ce qu'on imagine.» Gaston Bachelard, La psychanalyse du feu,1938. Ces informations précieuses m'ont permis de prendre le recul nécessaire pour parler de la Dame de granit comme étant plus qu'un fantôme, créer une polychromie, un mélange d'époque, et de récit se chevauchant et produisant un ensemble cohérent. Ma production a donc pris un chemin manufacturé. réapprendre à faire un corbelet, technique qui se passe de bouche à oreille, mais dans des matières plus contemporaines. cette forme du corbeaux architecturale, si présent dans la Manufacture, a tout pour supporter le poids des entretiens et de sa mémoire. j'en ai donc fait un réceptacle. en plexyglass produit par la technique du thermoformage. La manufacture existe par sa mémoire, par sa stature. il est donc nécessaire par la récolte d'informations de produire un écrin simple et sans fioriture. Ce travail, je le perpétue, afin de lui consacrer un instant. Nous avons opté pour une restitution physique durant l'année 2022. en attendant ce moment, j'ai pris quelques clichés de mes instants passés à travailler sur ce sujet si stimulant.
Dans le cadre du dispositif Contre vents et marées, avec le soutien de la Région Bretagne et en collaboration avec a.c.b - art contemporain en Bretagne