Pachamama, 2021
toile teintée, sérigraphie, structure métallique, dimensions variables, huile essentielle de fleur d'oranger, accrochage DNSEP, EESAB Rennes
C’est un endroit intime, sous les jupes de ma mère et pourtant immense quand on lui fait face. Circulaire mais aussi polymorphe, on la contourne pour trouver une entrée. Faite de multiples épaisseurs de toiles, elle revet milles couleurs et milles textures. On doit s’agenouiller pour espérer y entrer. S’agenouiller devant, comme une invocation à la Pachamama. C’est alors qu’on aperçoit une brèche, et une brume qui semble s’en échapper, il faut alors, avec patience, traverser les traces textiles une à une pour y pénétrer. Alors, tous les sens sont en éveil, les mains et les genoux s’affaissent sur un sol moelleux, c’est confortable. On se relève et on contemple, ça parait infiniment grand mais à la fois si petit. Les murs comme des rideaux malléables et modulables, semblent abriter tout et rien à la fois. Ce refuge brouille toutes les notions d’espace et de temps, il n’y a aucun lien avec l’extérieur. Je m’allonge et découvre le ciel, l’ouverture, la respiration de cet espace. Cette même brume aperçue plus tôt semble s’en échapper, comme un tipi accueillant un feu de bois, une cheminée molletonnée. Ça sent d’ailleurs un peu le bois mouillé, le muguet ou la fleur d’oranger. Étendue sur le dos j’observe les faisceaux lumineux traversants les voilages. Ils laissent apparaitre les couches successives des toiles et donnent à deviner les motifs saturés par les différentes épaisseurs. Par endroit la lumière est elle-même teintée, comme si rien à l’intérieur ne pouvait rester inchangé par ce berceau. Des rayons colorés modifient l’aspect des couleurs rencontrés sur leur passage.
Je lève les bras pour capter une lueur et vois ma peau recouverte d’un prisme coloré, protéiforme et changeant. Ici bas, coupée du monde, je ressens comme un sentiment de sérénité. J’y suis bien car je l’ai imaginé et choisi, je ne laisse rien au hasard, quoi qu’un peu, je me permet d’y invoquer ce que je veux et j’y projette ce que je veux.