Carla Bonavent

Au cours d'un temps de résidence collective, nous avons transformé l'espace d’exposition de l’Hotêl-Dieu en hôtel étrange, à la limite du miteux où les frigos ont des jambes pour pouvoir partir en courant et où les cafards se servent dans les bols de cacahuètes.
Dans cet hôtel, il y avait Henri, un rat de fond de frigo. Un poète dans l’âme qui écrit ses vers à la lumière des néons. Il m’avait confié qu’il avait toujours rêvé de les lire à voix haute devant quelques personnes. Sa confidence n’est pas tombée dans l’oreille d’une sourde.

Un frigo sur pattes traverse la pièce et s’installe derrière le comptoir. Un rat traverse la pièce dans un bruit de roulettes sur un sol grumeleux. Il se faufile dans le frigo. Un raclement de gorge et il prend la parole, il s’appelle Henri et écrit des poèmes au fond de son tiroir à légumes. Il aimerait en partager quelques uns avec nous. On est dans la pénombre à écouter ses histoires, d’un coup sa voix s’arrette et l’on entend retentir les premières notes de «When the Rain Begings to Fall» avec la voix de Jermaine Jackson, les lumières s’allument, on a le genoux qui gigote sur le rythme. Henry apparait, il a beaucoup grandi, il enfile une fourrure rose, attrape un plateau plein de verres qu’il nous offre, une olive flotte à l’intérieur, c’est un martini sans glaçon ! Merci Henri !